Grâce au don de sang bénévole en France, les patients peuvent bénéficier en tout temps et en tous lieux des produits sanguins dont ils ont besoin. Cette autosuffisance a été obtenue de haute lutte depuis 75 ans, grâce à la fidélisation de donneurs par l’Établissement français du sang (EFS). Peu de gens le savent mais chaque année, plus de 150 000 personnes quittent le circuit de collecte. Le renouvellement de la population des donneurs de sang se révèle donc un défi de taille.

« L’intégration des jeunes générations est vitale ». C’est avec ces mots que Jacques Allegra, président de la Fédération française pour le don de sang bénévole (FFDSB), décrit le défi à relever pour maintenir l’autosuffisance française en matière de dons sanguins.
Les jeunes vont-ils être d’aussi bons donneurs que leurs aînés ? Comment faire en sorte que cette habitude du don se transmette de génération en génération ? Autant de questions que l’Établissement français du sang (EFS) s’est posé en 2022, avec le lancement d’une cellule dédiée à l’étude des comportements des jeunes.
Les jeunes s’engagent
Le circuit de collecte repose sur un principe phare : la solidarité. Contrairement aux idées reçues, les jeunes d’aujourd’hui ont un sens accru de la solidarité. Selon Anne Muxel, directrice déléguée du Centre de recherches politiques de Sciences Po (CEVIPOF), directrice de recherches en sociologie et en science politique spécialisée dans les études sur la jeunesse, les jeunes ne sont pas moins engagés que les générations précédentes. « Il n’y a pas de recul de l’engagement des jeunes », affirme-t-elle. « Toutes les enquêtes récentes montrent au contraire qu’il y a davantage de bénévolat et d’engagement de la part des jeunes, tant dans les sphères institutionnelles et politiques que dans les sphères plus privées. »
« Il y a davantage de bénévolat et d’engagement de la part des jeunes, tant dans les sphères institutionnelles et politiques que dans les sphères plus privées. »
Anne Muxel, directrice de recherches en sociologie et en science politique spécialisée dans les études sur la jeunesse
Aujourd’hui, les jeunes sont surreprésentés parmi les donneurs de sang. En 2023, l’EFS dénombre 1 571 605 donneurs, dont 29 % ont entre 18 et 29 ans et 19 % entre 30 et 39 ans.
Deux bémols viennent ternir ce constat. Au sein de la jeune génération, la pratique du don décroît avec l’âge et est moins régulière. Ajoutons à cela que les jeunes sont bien plus mobiles que leurs aînés. Il faut donc redoubler d’effort pour aller les chercher.
L’enjeu de la fidélisation
L’EFS a donc décidé ces dernières années de cibler les collectes dans les établissements scolaires, les universités ou encore les espaces de coworking. Autre frein au développement : les jeunes sont très sensibles aux thématiques actuelles sur l’environnement, la discrimination et l’égalité.
Afin de les fidéliser, Cécile Lacroix-Lanoë, responsable de l’écoute donneurs à l’EFS, préconise de faire évoluer les centres de dons. Fini le sandwich carné offert dans des emballages en plastique. Les plats proposés demain seront aussi végétaliens ou végétariens et présentés dans des contenants écologiques. Les questionnaires pré-dons, considérés par les jeunes comme discriminants pour les minorités trans ou LGBTQIA+, seront retravaillés, tout comme les campagnes de communication souvent perçues par le jeune public comme trop genrées. Enfin, l’EFS prévoit de jouer à fond la carte de la mobilité, tant pour favoriser les dons ciblés que pour faciliter les modalités d’accès aux centres via smartphone.
Toutes ces initiatives ont un objectif commun à toutes les générations de donneurs : rester solidaire pour en cas de coup dur, pouvoir compter sur la générosité des autres.
Caroline Tsaganas